Les recommandations pour favoriser le développement des softskills liées à l’innovation

Sommaire :
LES SOFTS SKILLS LIÉES À L’INNOVATION
FORMER LES INDIVIDUS TOUT AU LONG DE LA VIE
ÉVOLUTION DU RÉPERTOIRE SPÉCIFIQUE ET DU COMPTE PERSONNEL DE FORMATION
SOUTENIR LES MANAGERS DE PROXIMITÉ
ADAPTER L’ORGANISATION DU TRAVAIL

 

Soft skills et innovation vont de pair, de l’avis des auteurs d’un rapport de France Stratégie et de l’Institut pour l’innovation et la transformation publié le 3 mai 2022. D’où la nécessité, selon eux, de développer les compétences transversales des salariés tout au long de leur vie. Ils formulent à ce titre sept recommandations, parmi lesquelles assurer une meilleure intégration des soft skills dans les programmes de formation professionnelle, former les managers de proximité aux enjeux liés à ces compétences et adapter l’organisation du travail pour la rendre propice aux innovations.

 

« Si être un innovateur n’est pas un objectif en soi, les compétences transversales impliquées dans les actions d’innovation et de transformation se révèlent essentielles dans la performance des organisations. Ces soft skills permettent d’agir dans l’incertain et de développer la capacité de chacun à agir et à résoudre des problèmes de manière collective. » Partant de ce postulat, les auteurs d’un rapport publié par France Stratégie et l’Institut pour l’innovation et la transformation, le 3 mai 2022, élaborent une série de recommandations sur la manière de développer les soft skills liées à l’innovation.

Intitulé « Les soft skills pour innover et transformer les organisations », ce rapport s’inscrit dans la continuité d’une précédente publication de France Stratégie sur les organisations apprenantes (lire sur AEF info). Il est le fruit de six années de recherche, entre 2015 et 2020, et de l’analyse de 364 profils de managers pour évaluer les compétences et les contextes de travail qui favorisent ou freinent les innovations et les transformations. Ses auteurs, Brieuc du Roscoät, Romaric Servajean-Hilst, Sébastien Bauvet et Rémi Lallement (1), identifient la formation, le management et l’organisation du travail comme autant de leviers pour développer les soft skills liées à l’innovation.

 

 

LES SOFTS SKILLS LIÉES À L’INNOVATION

Le rapport identifie onze soft skills à développer en priorité pour favoriser l’innovation :

  • sept soft skills pivots face à l’innovation : communication, collaboration, pensée rationnelle, extraversion, persévérance, ouverture et empathie cognitive ;
  • trois soft skills différenciatrices pour innover : convergence, divergence et tolérance à l’ambiguïté ;
  • une soft skill impensée : la réflexivité, en particulier dans le cadre d’une démarche d’apprentissage, ou plus globalement d’appropriation des compétences.

 

FORMER LES INDIVIDUS TOUT AU LONG DE LA VIE

Les deux premières recommandations formulées par les auteurs visent à « former et accompagner l’individu dans la prise de conscience, la mobilisation et la légitimation des compétences transversales ». Elles concernent à la fois la formation initiale et la formation continue. Les auteurs préconisent ainsi de « sensibiliser et former aux soft skills pour transformer et innover dès la formation initiale » (recommandation n°1) afin que la France se rapproche des modèles suédois, néerlandais ou américain.

Ils appellent également à « intégrer les soft skills et les méthodes de pédagogie active à la formation professionnelle » (recommandation n°2) par le biais de deux leviers. D’une part, « afin de compléter les cycles de formations techniques comme managériales, il semble primordial de les articuler avec des formations dont l’objectif est de développer les compétences liées à l’innovation et à la transformation ». D’autre part, « afin de mieux intégrer les soft skills dans la démarche d’apprentissage avec la création de programmes clairement identifiés permettant de développer les compétences transversales », « la formation professionnelle, dans le secteur privé comme dans le secteur public, se doit de constituer des groupes de travail », selon les auteurs.

Plus globalement, les auteurs appellent à « lancer une concertation nationale des différentes parties prenantes de la formation (publiques/privées) dans l’intérêt du développement de programmes sur les soft skills et de leurs usages dans un cadre de transformation et d’innovation ». « La mission du programme consisterait à sensibiliser, accompagner et éclairer les organisations publiques et privées sur la mise en œuvre d’actions et de diffusion de connaissances » et aboutirait à la « création d’un centre de ressources sur les soft skills pour les professionnels » (recommandation n°7).

 

ÉVOLUTION DU RÉPERTOIRE SPÉCIFIQUE ET DU COMPTE PERSONNEL DE FORMATION

Les auteurs avancent d’ores et déjà quelques pistes d’évolution concrètes. Ils suggèrent notamment que France compétences décline le répertoire spécifique en deux pôles distincts : « d’une part, les compléments professionnels liés à des compétences ou méthodes à dominante technique ; d’autre part, des certifications centrées sur les soft skills (leur potentiel, leur exploration et/ou leur mobilisation), et sans prérequis, portées par des structures elles-mêmes attentives à la transversalité ».

Ils estiment par ailleurs qu' »une version remaniée du CPF, et articulée à d’autres interfaces reconnues et/ou innovantes dans le champ de la formation, en particulier du côté des soft skills, pourrait contribuer à un usage approfondi de ce dispositif par les citoyens, mais aussi par les ressortissants étrangers intégrés à la vie socioprofessionnelle française ». « Un enjeu est notamment de pouvoir établir des ponts entre les compétences développées en milieu professionnel et dans des cadres extraprofessionnels, notamment le bénévolat », précisent-ils.

 

 

SOUTENIR LES MANAGERS DE PROXIMITÉ

Deux autres recommandations visent à « soutenir le management et les collectifs de travail dans les processus d’intégration d’une diversité de profils et des compétences transversales associées ». Les auteurs appellent ainsi à « faire de la diversité disciplinaire et culturelle une force exploratoire dans le travail d’innovation » (recommandation n°3). Ils préconisent à ce propos de « favoriser l’intégration d’une diversité de profils socioculturels, professionnels et/ou en termes de formation(s) antérieure(s) dans les services, les équipes et en amont des projets ». « D’une part, cela permet de ne pas biaiser la conduite de projets innovants par les représentations dominantes et souvent inconscientes d’équipes trop homogènes, afin d’accroître la portée sociale de l’innovation, détaillent-ils. D’autre part, on apprend à chaque individu à diversifier ses approches à partir de points de vue socialement, culturellement et techniquement situés différemment des siens. »

Observant que « l’action des managers porte souvent sur les processus et le reporting comme éléments tangibles d’indicateurs de performance », les auteurs appellent à « former les managers de proximité aux outils et indicateurs d’évaluation qualitatifs » (recommandation n°4). Dans le détail, ils suggèrent de prendre en compte les soft skills lors des recrutements et « d’inciter les managers de proximité à connaître plus finement les parcours de leurs collaborateurs, sur la base du volontariat de ces derniers, afin d’en cerner le potentiel de compétences ». Objectif : « que les managers soutiennent leurs collaborateurs – indépendamment du poste occupé – dans l’exploration de leurs expériences professionnelles et extraprofessionnelles, afin de déceler des compétences insoupçonnées qui pourraient renforcer à la fois l’innovation et le bien-être au travail ».

 

ADAPTER L’ORGANISATION DU TRAVAIL

Destinées à « aider les organisations à développer un contexte de travail permettant le développement des compétences transversales », les deux dernières recommandations impliquent de revoir l’organisation du travail. Choix du rythme de travail, libre ordonnancement des tâches, lieu de travail modulable, projets blancs (sans thème ni objet prédéfini) ou encore possibilité de se constituer un réseau au travers de rencontres en dehors de l’entreprise sont autant d’éléments permettant d' »inclure dans les missions professionnelles des possibilités d’appropriation personnelle du poste de travail et d’exploration des environnements extérieurs » (recommandation n°5). Charge aux employeurs d’interroger leurs salariés à propos de ce qui peut améliorer leurs conditions de travail.

Dans le même sens, les auteurs appellent les employeurs à  « créer des dispositifs de mobilisation des intelligences multiples des individus au service de la transformation et de l’innovation » (recommandation n°6), à l’instar de dispositifs de retour d’expérience entre pairs. Une démarche qui implique de « savoir donner du temps, imposer des marges de manœuvre, donner le droit à l’erreur, autoriser les divergences et les explorations, construire des collectifs informels, écouter, etc. », listent les auteurs.

 

Source  : AREFIE